Le Taylorisme

“Frederick TAYLOR is rich”: au delà du Taylorisme

Il n’est pas question ici de revenir sur le taylorisme en soi, néologisme inspiré du nom de son créateur, mais de s’intéresser à ce personnage atypique qui influencera la révolution industrielle de la fin du 19ème siècle.

Un ingénieur d’abord

Né d’une famille aisée de PHILADELPHIE, descendant de l’un des « pilgrim Fathers » dé o 27 an, débarqués du Mayflower en Amérique en 1620, le jeune Frederick est de santé fragile, avec des sérieux problèmes du vue durant son adolescence qui lui interdiront l’accès à HARVARD pour faire son droit, au grand désespoir de son père, juriste enrichi dans les affaires.

Il est cependant bon joueur de tennis et sera même champion des Etats-Unis en double à 25 ans.

Il se passionne pour la mécanique qu’il apprend sur le tas en qualité d’ouvrier dans une fabrique de pompes, avant d’intégrer la Midvale Steel Company en 1878. Il y est surnommé « La flèche » (Speedy) tant le souci de la vitesse et de la performance est déjà maladif chez le jeune homme.

C’est dans cette société métallurgique qu’il va progresser rapidement montrant ses talents de technicien, d’inventeur et de théoricien. Il sera entre autres l'inventeur de l'acier rapide en 1898, acier préalablement chauffé à une température proche de leur point de fusion.

Il devient ingénieur en chef de l’usine, en suivant des cours par correspondance le soir pour obtenir à 27 ans un diplôme d’ingénieur mécanicien du Stevens Institute of Technology.

 

Difficile transition

TAYLOR intervient dans une période de transition du monde industriel de cette fin du 19e siècle qui a vu le passage d'une économie fondée traditionnellement sur l'agriculture, de l’artisanat à une économie reposant sur la production mécanisée à grande échelle de biens manufacturés dans des usines.

Le patron comme l’ouvrier sont un peu perdus dans ce nouveau monde sans repères de la mécanisation.

TAYLOR, qui l’a vécu sur le terrain, dénonce aussi bien la passivité de la Direction qui ne s’oppose pas aux vieilles habitudes du passé que la « la flânerie systématique » de l'ouvrier ancrée dans l'esprit qu'un effort supplémentaire ne lui apportera rien.

Il découvre que l’image de l’ouvrier discipliné et fier de son travail était un mythe. Les ouvriers multiplient les gestes inutiles qui ralentissent la cadence de la production. Pire, les travailleurs se mettent d'accord sur une production journalière et ne la dépassent pas même s'ils en sont capables.

« C'est là une des formes de résistance mise en œuvre par les ouvriers à l'oppression et à l'exploitation des capitalistes » dira un contemporain.

Transformer l’essai

En 1900, Taylor décide de se retirer du travail, mais devient consultant, habitude bien américaine, enchainant conférences et séminaires afin de promouvoir les principes de la gestion scientifique du travail.

En fait, il est loin d’être le premier car de plus en plus de chercheurs s’intéressaient déjà à l’organisation de la production avec peu de retombées concrètes.

En effet, TAYLOR s'inspire du système de classification bibliothécaire inventé par Melvil DEWEY en 1872 mais aussi sur l’analyse du déroulement des tâches sur la base de la Time and motion study créée par Frank B. et Lillian M. GILBRETH qui seront aussi rendus célèbre par une autobiographie hilarante « treize à la douzaine » d’une famille de 12 enfants qui vit au rythme de l'application des principes de l'organisation scientifique.

TAYLOR avait une vision différente cependant, Les GILBRETH visaient surtout à réduire les mouvements pour améliorer le bien-être des ouvriers alors que TAYLOR visait d’abord à réduire le temps de production pour augmenter la productivité.

Ces visions différentes ont entraîné un fossé entre TAYLOR et le GILBRETH, qui envenima leurs relations. 

C’est son expérience de terrain d'ouvrier qui va le différencier de ces chercheurs de par sa perception des raisons pour lesquelles la productivité progresse lentement dans les usines.

La théorie de la gestion scientifique de Frederick TAYLOR est spécifiquement basée sur la création d'un système grâce auquel l'employeur et l'employé peuvent avoir la possibilité de recevoir le plus d'avantages et de prospérité possible.

Se caractérisant par trois idées essentielles :

  • L’utilisation maximale de l'outillage
  • La suppression de tout geste inutile dans les mouvements humains,
  • La préparation du travail

Ainsi, le taylorisme peut se définir comme la conjugaison optimale, recherchée scientifiquement, de la machine et de l'effort humain.

C’est ainsi l’occasion de tester sa théorie dans différentes industries et de publier ses premiers textes dans la revue de l’Association des ingénieurs mécaniciens (ASME), dont il est membre depuis 1896.

« Tu n'es pas censé réfléchir, il y a déjà des gens payés pour ça ici » disait-il aux ouvriers avec quelque ironie. 

A partir de 1901, il se consacre à la propagation de ses idées aux Etats-Unis, où il bénéficie d’un coup d’accélérateur en accédant à la présidence de l’ASME en 1905.

 

Des oppositions dures

De son vivant, plus de 200 entreprises dans le monde auront adopté avec plus ou moins de succès ses principes d’organisation.

La France est le premier pays à traduire ses écrits en 1907. Il faudra toutefois attendre 1910 pour en voir les applications concrètes chez RENAULT et PANHARD et LEVASSOR, non sans susciter de fortes grèves en 1912 et 1913.

Malgré ces résultats encourageants sur la productivité, nombre de syndicats et d’ouvriers sont défavorables à cette méthode de travail qui est jugée aliénante et déshumanisante. 

En 1912, les conflits sociaux de l’Arsenal de Watertown l’obligent à exposer ses méthodes devant une commission d’enquête gouvernementale

Et pourtant, selon TAYLOR, son approche ne génère aucun conflit, la prospérité de l'un est liée à la prospérité de l'autre dans un démarche gagnant-gagnant.

L’effort industriel de la Première Guerre mondiale que ne verra pas l’intéressé sera un remarquable laboratoire pour ses travaux afin de mettre au travail du personnel peu qualifié.

 

Epilogue

 

Il quittera ce monde dans sa 60ème année au début de la grande guerre atteint d’une pneumonie, laissant une femme et 3 enfants adoptés.

En fait, c’est Ford et son fordisme qui exploitera ces concepts en inventant par ailleurs la production à la chaîne.

La petite histoire dit que c’est au retour d'une visite d’un abattoir où les animaux étaient dépecés par étapes, en circulant sur un tapis roulant que L'efficacité d'une personne s'occupant toujours de la même pièce des bêtes attira son attention.

Le semblant d’humanisme selon TAYLOR va disparaitre dans le fordisme qu’on qualifierait aujourd’hui de libertarien, les relations « amicales » … et commerciales de Henri FORD et HITLER en étant un exemple, Henry FORD partageant d’ailleurs avec Hitler un antisémitisme violent et obsessionnel.

Quoi de mieux que le film « les temps modernes » de Charlie CHAPLIN, sorti en 1936, pour caricaturer ce travail à la chaine déshumanisé.

Ce taylorisme que je qualifie de brutal aura la vie dure et la décomposition des taches et son inévitable chrono sera encore là dans les années 70, j’en serai témoin.

En conclusion, il est un point qui est rarement mentionné, l’importance de l’ergonomie du poste de travail dans une approche tayloriste, avant tout pour rationaliser et optimiser le geste répétitif.

Mais, indirectement, il a optimisé l’impact physique de ce geste répétitif sur l’ouvrier. A la fin du taylorisme, cette assistance ergonomique ne sera plus d’actualité puisque, dans bon nombre de métiers, l’opérateur ne fera que charger une machine et pourtant, ces gestes et postures non optimisés auront de grave conséquences à terme avec l’apparition des fameux TMS (Troubles Musculosquelettiques).

 

Daniel DIGUET

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